CPF: Décision prise sur le reste à charge

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A la suite d'une réunion interministérielle qui s'est tenue le 22 février, l'Elysée vient de trancher en faveur d'une participation forfaitaire de 100 euros sur chaque achat de formation, et non pas d'un pourcentage d'au moins 10 % comme le souhaitait Bercy , selon des informations obtenues par « Les Echos », confirmées de source gouvernementale.

L'entrée en vigueur de la mesure est prévue le 1er mai 2024 par décret. Compte tenu des exonérations, pour les chômeurs notamment, l'exécutif en attend jusqu'à 250 millions d'euros d'économie cette année et 375 millions en année pleine, en ligne avec l'épure avancée par le ministre du Budget, Thomas Cazenave, lors de l'annonce du plan d'économie de 10 milliards sur les dépenses publiques . La moitié par effet direct sur les achats réellement payés ; l'autre moitié en estimant à 20 % le taux de non-recours, c'est-à-dire le taux de renoncement des titulaires de CPF devant la perspective de devoir débourser 100 euros de leur poche.

Guichet ouvert

Pour rappel, le CPF fonctionne comme un guichet ouvert depuis la réforme Pénicaud de 2018 qui a supprimé tout intermédiaire entre le titulaire et l'organisme de formation et l'a basculé en euros. Son financement est assuré par une partie de la contribution formation professionnelle et apprentissage des entreprises (Cufpa), qui sert aussi à subventionner les centres de formation d'apprentis et à financer d'autres dispositifs, selon une répartition votée chaque année par le conseil d'administration de France compétences.

Avec l'augmentation de l'emploi et des salaires, les recettes tirées de la Cufpa ont beaucoup augmenté mais pas suffisamment pour couvrir toutes les dépenses pilotées par France compétences qui se sont envolées.

L'Etat par conséquent est obligé de couvrir les déficits (encore 2,4 milliards prévus en 2024), malgré un sérieux coup de frein sur les dépenses. Celles du CPF n'y ont pas échappé avec une réduction du nombre d'organismes de formation éligibles, des contrôles antifraude ou encore une procédure d'accès durcie pour les titulaires.

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Résultat de ces coups de frein, les dépenses, nettes des annulations, engagées avec le CPF sont passées de 2,6 milliards en 2022 à 2,1 milliards en 2023, dont 3 % (soit 63 millions) financés par les titulaires eux-mêmes. Tout à la recherche d'économies, Bercy estime que le compte n'y est pas. Un amendement au budget 2023 instaurant un reste à charge avait été voté, non sans mal, mais le décret d'application est resté dans les cartons pour des raisons juridiques. L'arbitrage de l'Elysée laisse entrevoir la fin du feuilleton.

« Un forfait de 100 euros par formation est beaucoup moins pénalisant que les 10 % au moins portés par Bercy », souligne-t-on au sein de l'exécutif. C'est vrai en moyenne puisque si l'on applique ce reste à charge forfaitaire au coût moyen d'une formation via le CPF constaté en 2023 (1.560 euros), on aboutit à une ponction de 6,4 %.

Perdants et gagnants

Sauf que cette moyenne, comme toute moyenne, ne dit rien de la dispersion des formations suivies, et donc de leur coût. En clair, le forfait de 100 euros adoucira la ponction pour ceux qui utilisent leur CPF pour passer un diplôme long, CAP par exemple, et donc plus cher. Elle sera plus lourde en revanche pour ceux qui l'utilisent pour des formations courtes et moins onéreuses, comme le permis voiture ou conduite d'engins, qui comptent parmi les plus demandées.

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Reste maintenant à la ministre du Travail, Catherine Vautrin, à présenter tout cela aux partenaires sociaux à qui elle a promis une concertation sur le sujet. Même si l'arbitrage ne laisse pas grand-chose à préciser, les syndicats tenteront sans doute d'alléger la note.

Quoi qu'il en soit, les 250 millions d'économies visées cette année représentent une bonne partie de l'effort imposé pour 2024 au ministère du Travail, à savoir 1,1 milliard, sur les 10 milliards visés par Bercy tous ministères confondus .

Exonérations en dessous de 1.500 euros ?

Contactée, la Fédération des acteurs de la compétence, première organisation du secteur, a fait part de sa satisfaction du choix d'un ticket modérateur forfaitaire, formule pour laquelle elle plaidait, mais reste « réservée » sur le montant de 100 euros. Jugé « élevé », ce montant « pourrait freiner fortement l'accès des actifs au CPF dont plus de 80 % des bénéficiaires sont des ouvriers-employés », souligne-t-elle. Et de proposer une exonération pour les formations en dessous de 1.500 euros.

 

 

Source: Les Echos

 

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